Bretagne réunie doit défiler au festival interceltique de Lorient
- Rédacteur
- 1 juil.
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L’interdiction faite à Bretagne réunie de défiler avec sa banderole au fil est tout sauf
anodine. Elle éclaire les temps actuels où l’on demande à la Bretagne de rentrer dans le rang
pour se réduire à l’état de « région » mièvre, dénuée d’altérité.
Le fil fut créé par des sonneurs qui avaient une haute idée de la Bretagne, de sa culture et du
combat persistant pour la sauvegarder.
Ses dirigeants actuels, pilotés par un ancien sous-préfet, n’y voient qu’une activité
intéressante pour la retraite, gratifiante pour l’Ego et favorable à l’économie touristique.
Dit autrement, l’esprit n’est plus le même. Ce que l’on a perdu ? La conscience de nous-
mêmes, de notre altérité bretonne et du combat que nous devons mener pour la voir
reconnue, considérée, sauvegardée.
La « régionalisation », c’est la fin de notre altérité bretonne. Il faut la contester sans relâche.
On nous bassine avec ces « langues régionales » qu’il faut sauvegarder au nom de la
diversité. Parlez de « langue régionale » ? Mais vous l’avez déjà déconsidérée aux yeux de
tous et vous l’avez déjà tuée. Parlez de défendre les « les langues régionales » ? Vous donnez
déjà raison à votre contradicteur. Il n’y a plus rien à dire. La langue bretonne est la langue de
notre peuple, l’une des plus ancienne d’Europe et l’expression de notre humanité, de notre
regard singulier sur le monde.
Loig Chesnais-Girard défend sa « région » comme il le ferait dans le limousin ou partout
ailleurs. Il n’a jamais eu le sens et l’idée du peuple breton. Les 70 pages du rapport, qu’il a
transmis à l’Etat sur l’autonomie, n’est qu’un document sans ossature et contradictoire. Pas
une seule fois, il n’évoque « le peuple breton », la seule véritable justification à l’autonomie.
Mais nous l’avons élu, comme le CA du fil a élu un ancien sous-préfet en qualité de
président !
C’est dans nos têtes que nous glissons, peu à peu.
On se plaint de la perte de l’esprit militant. Les bénévoles ne sont plus là. Mais pourquoi ne
sont-ils plus là ?
La « région » a pris le contrôle de tout et désamorce notre altérité. Le besoin de subvention
créée le clientélisme. Comment un peuple de clients ou de fonctionnaires peut-il songer à
s’émanciper ? Le clientélisme donne à la « région Bretagne » le sentiment de contrôler la
dynamique bretonne. Dans ces conditions, pourquoi la « région » chercherait elle à faire
bouger les choses, à mettre la pression sur M. le recteur d’académie pour obtenir quelques
avancées linguistiques ? Mr Chesnais Girard contrôle le mouvement breton qui ne bouge
plus trop. Il fait copain-copain avec M. le recteur et la langue bretonne se meurt.
Les chiffres parlent. Lorsque le taux de progression du nombre d’élèves en classe bilingue ne
dépasse pas 1%, que le nombre d’élèves et de bacheliers reste dérisoire, c’est que la
dynamique n’existe plus. La politique linguistique est en échec et qui le dit aujourd’hui ?
Il ne faut pas désespérer Billancourt.
La culture bretonne est en crise ? Beaucoup de structures disparaissent ou sont en
souffrance. Le mouvement culturel breton a-t-il seulement songé à en débattre
publiquement, ne serait-ce que durant une seule journée, pour esquisser des initiatives
collectives ? Aucunement. Y a-t-il encore un pilote dans l’avion, une conscience unitaire ?
Je rêve d’un mouvement breton suffisamment fort et autonome pour faire pression sur le
politique, au lieu de dire amen à tout ce qui vient de la « région ». Le démantèlement des
instances de la charte culturelle fut une erreur historique et témoignait déjà d’une perte de
l’esprit d’indépendance au profit du PS.
Chacun se recentre sur son asso et fait comme il peut. L’esprit est à la résignation et à
l’intérêt particulier.
On se plaint du faible attrait de la jeunesse pour la cause bretonne ? Mais vous avez envie de
rejoindre une « région » mièvre, vous ? De défendre une langue et une culture
déconsidérées et donc « inférieures » ? Il faut faire rêver les jeunes, leur donnée conscience
d’une épopée, nourrir leur imaginaire.
C’est dans le mouvement, dans la fierté retrouvée, dans la libération de notre imaginaire et
de nos forces d’émancipation que nous gagnerons la partie et déciderons enfin de tout ce
qui nous concerne.
C’est pourquoi la décision d’exclure « Bretagne réunie » association méritante et
symboliquement indépassable, ne peut être tolérée.
M. le sous-préfet à la tête du Fil ne fera jamais rêver personne avec son festival en l’honneur
de la culture à vocation touristique d’une Bretagne croupion.
Il faut lui rappeler que « la région bretagne » ne nous intéresse pas, car nous sommes un
peuple, rien que cela.
Pour ma part, je ne mettrai plus les pieds au FIL.
Yvon Ollivier
auteur
Est-ce que les bagadou et les cercles seront capables de défiler dans les rues de Lorient au seul son des tambours, comme ils l’avaient fait à Brest dans les années 60 pendant le Festival des Cornemuses, le prédécesseur du FIL. Rien n'est moins sur, hélas.
Photo de la grande parade 2017 https://commons.wikimedia.org/wiki/File:FIL_2017_-_Grande_Parade_133_-_Bretagne_R%C3%A9unie.jpg © CC Jérémy Kergourlay