Langue Bretonne : Notre avenir se décide à Carhaix
- Rédacteur
- 28 août
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Oui nous pouvons agir !
Le 6 septembre aura lieu à Carhaix un concert en langue bretonne et une conférence sur l’avenir de notre langue initiés par des artistes.
Suite aux déconvenues récentes, sans véritable réaction du monde politique ou culturel, un groupe d’artistes a eu le grand mérite de relever la tête et de s’interroger sur notre avenir.
Lorsque notre monde s’écroule – diffusion, édition, centre culturel, associations etc. – le premier réflexe doit être de se poser les bonnes questions.
L’Emsav existe-t-il toujours ? Est-il encore capable de s’exprimer lorsque le mouvement s’arrête ou s’effondre ? Est-il encore capable d’exprimer une volonté qui soit différente de celle des instances régionales ? Sommes devenus si divisés entre chapelles que la moindre réaction unitaire devient illusoire ? Le dialogue est la première des urgences.
Où est l’origine de nos maux ? Un système France centralisé en crise qui recentre à Paris toutes les ressources ou notre incapacité à réagir et à aller de l’avant ?
Il y a plusieurs décennies, des militants ont pris des initiatives fortes. De quoi sommes-nous capables aujourd’hui ?
La région Bretagne nous dit qu’elle ne peut rien faire de plus, faute d’argent et que nous devons prendre notre mal en patience. Qui a dit que l’inaction était salutaire ?
Nous sommes tous concernés pour sauver la langue bretonne. Pour cela, deux chiffres importent vraiment : le taux de progression du nombre d’élèves scolarisés en filière bilingue, et le nombre de bacheliers dans ces filières.
Le taux de progression a baissé régulièrement depuis plusieurs années pour atteindre 1 %, ce qui signifie qu’il n’y a plus de dynamique. Dit autrement, on ouvre et on ferme presqu’autant de filières. Le nombre de bacheliers dans ces filières demeure dérisoire, preuve du manque de continuité éducative. Si rien ne change, la langue bretonne va mourir car il n’y a pas de sursaut en vue avec un taux d’élèves scolarisé qui reste dérisoire entre 4 ou 5 % lorsque les Basques ont dépassé les 50 %.
La région Bretagne ne met aucune pression politique sur l’État pour lancer ce grand plan de formation des enseignants en place en langue bretonne, à l’image de ce qui a été fait en corse. Il y a des années que nous aurions dû le faire. A l’échelle de ce que l’État a fait en Corse (700 enseignants en 4 ans), nous pourrions former des milliers d’enseignants. Cette demande figure en bonne place dans le plan Marshall pour les langues de Bretagne, qui selon les accords électoraux Chesnais-Girard/Cueff devait se situer au cœur des politiques linguistiques.
La question est éminemment politique. Nos responsables politiques veulent-ils que les chosent changent où se satisfont-ils de la mort annoncée de nos langues ?
Si nous voulons changer la donne, il faut bouger. Oui la situation est urgente et oui, nous pouvons mettre la pression sur nos élus à la région, pour qu’à leur tour, ils la mettent sur l’État.
Il y a quelques années, un élu bien connu, Jean-Yves Cozan m’avait dit ceci à Ouessant : « Un homme politique, c’est un baromètre ! » Si les Bretons ne sortent pas de leur torpeur et du « on ne peut rien faire » qui contente aujourd’hui à peu près tout le monde à la région comme du côté de l’État, nous perdrions notre langue et le sens de nous-mêmes.
Et l’État français verra avec succès la réussite de son objectif de toujours : la disparition de la langue bretonne avec en outre la satisfaction de relever que ce sont les Bretons eux-mêmes, qui, sous couvert de « décentralisation », auront achevé leur langue moribonde.
Pour faire bouger les élus, il faut bouger, lancer une dynamique !
On parlerait encore de la toponymie en langue Bretonne. Au mois d’octobre dernier, Koun Breizh et Kevre Breizh avaient adressé une demande à la région Bretagne : solliciter officiellement l’État pour que notre toponymie fasse l’objet d’une demande d’inscription au patrimoine immatériel de l’Unesco, afin de mettre un terme à ce grignotage incessant. Nous attendons toujours une concrétisation !
Une dernière chose qui me tient à cœur. Arrêtons de parler de « langue régionale ». Les mots ont un sens. Une langue régionale est une langue secondaire, inférieure. Elle n’a aucun avenir sinon folklorique. Je ne connais rien de plus stupide que de prétendre sauvegarder une « langue régionale », puisque déjà, il est acquis qu’elle est secondaire. La langue bretonne est la langue de notre peuple et c’est pour cette raison que nous devons la sauver.
Il faut mettre un terme à cette « régionalisation des esprits » qui nous condamne à une mort certaine et compromet la réunification de notre territoire historique.
Pour ma part, je serai présent le 6 septembre dans l’espoir que les choses changent vraiment et que les Bretons soient capables d’une réaction forte et collective.
La politique linguistique est une politique comme une autre. Il est facile de savoir si elle fonctionne ou pas selon l’objectif qui lui est assigné.
Si l’objectif de la politique linguistique actuelle menée conjointement par l’État et la région est de faire illusion, alors oui, c’est une belle réussite. Si l’objectif de cette politique-là est de sauver la langue bretonne et de l’enseigner à tous nos enfants, alors force est de constater que l’échec est patent. Alors arrêtons de nous bercer d’illusion. La langue bretonne, il ne tient qu’à nous de la sauver !
Le 6 septembre, soyons tous à Carhaix pour faire de cette journée une réussite et suivre les artistes qui nous ont montré la voie pour sortir enfin de la torpeur.
Yvon Ollivier
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